Dans la vie il y a deux catégories de bikers: les dégonflés qui prennent le bitume,
et les braves qui prennent la piste.

Ce récit traite de cette deuxième catégorie de bikers: les braves !

Le programme du jour était une piste de 120km “inédite”: aucune des traces que j’avais récupérées à droite à gauche n’y passait, mais les rares photos du coin aux allures d’Ouest américain m’ont convaincu, ça se tente !

Je vois les deux couples en 4×4 à l’auberge, sur leur pc, en train de regarder leur trace du jour. On en discute, et comme de par hasard ils passent eux aussi par ma piste “inédite”, apparemment “la plus belle piste pour rejoindre Zagora”. Parfait !

Les 4×4 prennent la route. Je rejoins Yoda à côté de la piscine pour lui voler son petit déj’ comme chaque matin. Les autres nous rejoignent, Zoom traîne un peu car toujours à la recherche du portable perdu.

Yoda préfère prendre la route en solo aujourd’hui. C’est contre notre principe de rester toujours au moins en duo, mais exception pour Yoda: en pointe à 30km/h sur bitume il ne risque pas grand chose, et de toute façon il n’a déjà plus de tête de fourche alors…

Nous voilà partis à 6 pour rejoindre l’entrée de la piste à 15km à l’est de N’Kob. Je passe devant, suivi de Nabil. La piste attaque en douceur, du roulant easy, puis très vite du moins roulant moins easy façon “sable gris mais sable quand même”. Papy en profite pour se répandre au sol et baptiser sa valise alu roumaine (une tradition il parait). Akim et sa cheville en vrac n’apprécient pas spécialement ces passages, mais il est content d’avoir pu assister ET filmer l’atterrissage de Papy. Et zoom comme à son habitude se dandine, un coup à droite, un coup à gauche, de travers, sûrement pour nous vanter la stabilisation de sa caméra à 47€ sur eBay.

Après ces 500m de mise en forme et le ptit déj’ toujours sur l’estomac, v’là que la piste se transforme en single track et grimpe franchement jusqu’au col façon montée impossible.

Je continue sur ma lancée et grimpe le bordel. ‘tin mais les 4×4 sont passés par là ??? J’en doute.

J’entends un klaxon. Nabil un peu plus bas me fait signe d’arrêter. Il est en nage, et les autres ne suivent plus du tout. Là sur la photo on voit à peine la troupe au moment où Nabil et moi nous arrêtons, c’est dire s’ils traînent dans le sable ! En voyant la montée qui nous attend, la motivation des “braves” en prend un coup. On se pose 10 minutes histoire de reprendre des forces et étudier la trace.

Deux marocains descendent sur leur mob. J’en profite pour leur demander l’état de la piste après le col, avec l’éternelle question:

– y’a du sable ? combien de km ?
– 10km seulement! il m’annonce

Après quelques secondes de négociation, j’obtiens 4km de sable, puis 3km, mais ça sera son dernier prix mot. Les marocains aiment négocier on le savait, mais même les km de sable !

Décision prise: on fait demi-tour. Les marocains nous aident à descendre une à une les 3 bécanes engagées dans la montée. La mienne est trop loin, je préfère finir de monter et faire demi-tour sur un “plat”. La descente aura été bien bien stressante, j’aurai trimbalé 12kg de nitroglycérine ça n’aurait pas été pire.

On repasse le sable gris parce-qu’on-aime-ça et nouvelle pause pour étudier une piste alternative, un peu plus à l’est, indiquée par les deux marocains… et attendre Papy sûrement encore vautré dans le sable.

Zoom en profite pour essayer la mob chinoise: une légèreté hallucinante, pour 3000€ la bête. Aucune hésitation, il négocie avec le marocain pour échanger la Super Ténéré d’Akim contre la chinoise !

Voilà Papy qui revient… suivi de deux 4×4… ? les français de l’auberge! La tourista a eu raison de leur derrière ?

Ils sont bien passés par là, apparemment facile pour eux. Mais de l’autre côté du col la piste traverse un oued bien défoncé, avec de gros trous et surtout une piste en single track. Pas moyen de passer pour eux sans risquer d’y rester. Nous voilà tous dans la même situation: rejoindre la piste plus à l’est. Gaz !

On tourne en rond pour trouver l’entrée de la piste. Papy se souvient être passé par là dans les années hippies “c’est chiant à trouver au début mais après c’est du 140 ! Le Dakar passait par là.”… bon en attendant on a le choix entre du sable ou du sable, d’ailleurs Akim choisit d’arrêter là et de rejoindre Zagora par la route. Loulou l’accompagne pour ménager son embrayage. Il ne reste plus que 4 braves: Nabil tjr chaud bouillant (et affamé), Zoom qui a promis de tjr rester avec son gendre Loulou (humm ?), Papy qui ouvre la route vu qu’il connaît, et moi impatient d’en découdre enfin sur du roulant.

Bizarrement, 50m après qu’Akim et Loulou soient partis: plus de sable du tout, jusqu’à Zagora.  À la place, des paysages magnifiques, typés américains, et surtout beaucoup (beaucoup) de caillasse.

On s’arrête à une petite école. Distribution de crayons, cahiers, blocs note, jeux de carte, et peluches, tout y passe. Les enfants sont contents, et notre paquetage ainsi allégé aussi.

On reprend la route, je passe devant avec Zoom qui ne ménage pas sa Transalp et nous fait quelques beaux “tout-droit”! Je me rappelle la phrase de l’ancien: “après c’est du 140”, et j’ai beau être en forme, pour le moment c’est grand grand max du 60/70 sur les portions “roulantes”. Le reste du temps la piste traverse plusieurs dizaines de petits oueds en grosse caillasse, trous et bosses bien raides. La 1190 se comporte à merveille, c’est dans la caillasse qu’elle m’impressionne le plus, et la Transalp fait au moins aussi bien avec son zouave perché dessus.

Pas de photos de ces passages, on a gazé tout le long comme des furieux ! D’ailleurs il est où Papy ?? Pause à l’ombre, et photos pour la peine.

10 min plus tard, le revoilà, avec une épaule et une jambe douloureuses en bonus: 2^ème vautrage de la journée (pour quelqu’un qui, parait-il, ne tombe jamais), mais ce coup-ci dans de la bonne caillasse. Aille. Besoin de repos, et de manger.

Il sort les restes du bivouac… datés de 4 jours et 500km plus tôt, qui ont eu le temps de mijoter dans la valise alu, en prime parfumés à l’eau de rose vu qu’une des bouteilles a explosé dans le bordel. Des biscuits chocolat / eau de rose, original, mais je donne ma part à Zoom et Nabil ça ira

Il reste une bonne trentaine de km de piste, mais moins caillouteuse. Du pur bonheur, on a enquillé ça sans s’arrêter, gaz en grand, les roues qui décollent sur les bosses et le sabot de Zoom qui frotte à la moindre occasion. Zoom passe devant, on se suivit collés pour éviter de trop manger la poussière. Toujours pas du 140, mais bien 100/110 par endroit. Bref, un grand moment d’évasion

A la fin de la piste, on attend Nabil et Papy qui ménagent un peu leurs forces.

Reste 40km de piste-autoroute, futur route bitumée qui rejoint Zagora depuis l’est. Là, 140, c’est une petite moyenne. La route est stoppée et on doit sortir pour rejoindre la piste auxiliaire. L’occasion pour Zoom de couper au-travers un tas de caillasse + terre molle. “Plotch” sur le flanc gauche, forcément (j’ai la video ^^). Nabil s’arrête pour l’aider et se vautre aussi en descendant de sa meule. Des braves je vous dis !

On rallie Zagora rapidement (140 quoi !). Les 2 roues se dandinent mais ça tient. A l’entrée de la ville, un 4×4 d’assistance nous arrête.

– Votre ami avec la moto bleue vous attend au garage

Hein? Mais comment il sait lui ?

On s’arrête manger chez Souad, quand même, les braves l’ont mérité !

Puis on rejoint la troupe au garage. Tout le monde est bien là, la Super T encore les tripes à l’air, à croire qu’elle aime ça.

Un bordel organisé.

Papy connaît l’hôtel. Apparemment il y a une piscine, et un bar avec des bières…. OK bon on laisse Loulou35 au garage, on t’attend à l’hôtel hein